Extrême-droite en Bretagne

24 février 2023 Exilés, Extrême droite, Revue de presse Comments (0) 409

Si le Rassemblement National a toujours été plus bas en Bretagne qu’ailleurs, notre région n’est pas épargnée par les courants d’extrême-droite, avec pour particularité que certains courants indépendantistes sont tiraillés, reprochant le « jacobinisme » de l’extrême-droite nationale, tout en partageant certaines idéologies nauséabondes, allant du rejet de l’immigration jusqu’à certaines théories néo-nazies.

Alors que plusieurs médias et élus locaux font l’objet de menaces, qu’un premier projet de centre d’accueil d’exilés a malheureusement été abandonné suite à la pression de ces courants extrémistes, et que d’autres projets sont aussi sur la sellette, il semble utile de dresser un état des lieux, non exhaustif et évolutif, des acteurs régionaux de ces mouvances.

Dernière mise à jour : 27 février 2023

La Bretagne est une région singulière avec une identité forte. Considérée comme une terre de résistance à l’extrême-droite, le Rassemblement National y a toujours fait des scores plus faibles que dans le reste du pays, même si cet écart s’est réduit lors des dernières élections.

Cette identité forte induit une particularité régionale : des courants et partis proches du mouvement breton, allant de l’extrême-gauche à l’extrême-droite, avec des revendications allant du régionalisme à l’autonomisme, en passant par l’indépendantisme ou le nationalisme.

La candidature d’Eric Zemmour a redonné un petit élan à ces mouvances, mais l’extrême-droite, qu’elle soit représentée par des partis nationaux ou régionaux, reste très minoritaire dans notre région. Malheureusement, les courants minoritaires, quels qu’ils soient, ont souvent tendance à compenser cette minorité par des actions violentes, médiatiquement ou physiquement. De manière plus triviale, on pourrait résumer ce principe par « 3 gueulards occupent plus de place que 30 qui se taisent ».

Il peut donc sembler paradoxal de dédier un article à ces acteurs minoritaires et qui ne sont donc pas représentatifs de la Bretagne. L’objectif n’est pas de leur donner plus d’importance qu’ils n’ont, mais de permettre une meilleure connaissance de ces différents acteurs et mouvements, afin de mieux combattre leurs idées, déconstruire leurs réseaux et objectiver leurs liens de dépendance.

Plus d’infos sur les partis politiques de l’ « emsav » (mouvement breton) 

Pour plus d’infos sur les mouvements bretons en général : « Quand les Ploucs montrent les dents : état des lieux du mouvement breton »

LES PERSONNES

Boris LE LAY

Citoyen français né en Bretagne (Quimper), immigré à l’étranger pour échapper aux lois françaises, obnubilé pathologique des étrangers qui immigrent en France.

Il a été condamné à plusieurs années de prison pour négationnisme, apologie de crime, menaces de mort ou provocation à la haine raciale… mais il n’a pour l’instant encore jamais purgé la moindre peine.Il a créé plusieurs sites internet, certains sous sa véritable identité, d’autres de manière anonyme. Certains sites et plusieurs de ses comptes sur les réseaux sociaux ont été fermés, à la suite de plaintes ou grâce à l’action d’un hacker en février 2022

Son blog, borislelay.com, et son site breizatao.com, son désormais inactifs.

Cette page Facebook est toujours active : https://www.facebook.com/breizhouratav.

Boris le Lay est revenu récemment dans l’actualité, ayant été « logé » au Japon

Il est toujours très actif sur internet, sous divers pseudos et sur des sites qui ne sont pas « régionaux ». Il intervient sous le pseudo « Gandalf le blanc » ou « Captain Harlock » sur son site « Démocratie participative », qui diffuse des podcasts de chroniques sur l’actualité, mais qui sert surtout de tribune aux théories néonazies, antisémites, racistes, homophobes… https://dempart.space

Il a aussi créé le forum « Europe Ecologie les Bruns », où il participe sous les mêmes pseudos. https://eelb.su/index.php

Il est également à l’origine du « Parti national Breton », mouvement lancé fin 2021, reprenant le nom d’un ancien parti nationaliste d’extrême-droite de l’entre-deux guerre (voir plus bas). Suite à la fermeture de sa chaine Youtube, il diffuse désormais ses vidéos sur Odysee, plateforme vidéo sans modération.

Plus d’infos : https://fr.wikipedia.org/wiki/Boris_Le_Lay

Yann VALLERIE

Ancien président du mouvement « Jeune Bretagne » (dissout en 2013), il a été candidat aux élections cantonales sous cette bannière, à Fouesnant, en 2011 (405 votes, soit 4,01% des voix exprimées) 

L’année suivante, il se présente aux législatives à Morlaix, mais ne recueille que 301 voix, soit 0,58% des suffrages exprimés).

Il a ensuite fondé en 2013 le site Breizh-Info, dont il est encore aujourd’hui rédacteur en chef : https://www.breizh-info.com/

Breizh-Info fait partie des sites dit de « réinformation », qui diffuse quelques informations régionales classiques afin de donner l’apparence d’un site traditionnel, mais diffuse surtout largement des contenus de propagande d’extrême-droite, tout en veillant à ne jamais tomber sous le coup de la loi, quitte à flirter avec la ligne jaune (ou plutôt brune).

Une bonne partie des articles traite surtout du rejet de l’immigration et sert de marchepied occasionnel au Rassemblement National et à Reconquête.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Breizh_Info

Yann Vallerie réside à côté de Callac, il avait d’ailleurs tenté de rentrer dans l’équipe municipale en 2014 : https://www.ouest-france.fr/bretagne/duault-lencombrant-passe-dun-colistier-1975685

Début 2022, il publie « Sécession », un pamphlet politique appelant à « agir plutôt que de subir la tyrannie sanitaire, la répression politique, la terreur médiatique, le naufrage scolaire, le grand remplacement », etc. Le livre est préfacé par Piero San Giorgio, auteur survivaliste  qui s’est illustré en déclarant, dans une vidéo Youtube (aujourd’hui supprimée), que « La vraie nature des Européens c’est d’être un Waffen SS, un lansquenet, un conquistador ».

Il serait à l’origine de la médiatisation, fin 2022, de l’ouverture d’un centre d’accueil d’exilés dans cette commune, qui a généré une forte mobilisation des réseaux d’extrême-droite (notamment Reconquête). Suite à des menaces sur les élus et sur les médias locaux, la municipalité a fini par abandonner le projet.

Philippe MILLIAU

Habitant de Clohars-Fouesnant, il a été dirigeant du mouvement « Bloc identitaire », élu du Front National, puis du parti de Bruno Mégret. En 2021, il est coordinateur de campagne d’Eric Zemmour pour la Bretagne et les Pays-de-la-Loire.

En 2014, il co-fonde « TV-Libertés », dont il est encore aujourd’hui le président.

Cette web-TV fait partie de ces médias qui se revendiquent de « réinformation », une sorte de « Fox News à la française », marchepied des partis nationaux d’extrême-droite.

Jean-Yves le GALLOU, l’inventeur du concept de « préference national » (version moderne du national-socialisme), est un des intervenants les plus réguliers de cette web-TV.

TV-libertés flirte allègrement avec toutes les thèses complotistes courantes, que ce soit sur le COVID, l’Ukraine, Poutine… avec une tendance larvée à l’appel survivaliste, la sécession, voir l’appel à la prise des armes… (« Il faut se préparer à l’effondrement », « Si la France renaît, ce sera dans le sang », etc.).

Ce média national est quand même assez ancré régionalement et sert régulièrement de tribune aux acteurs bretons d’extrême-droite.

https://fr.wikipedia.org/wiki/TV_Libertés

Tristan MORDRELLE

Il est le fils du militant nationaliste Olivier Mordrel, condamné à mort pour collaboration pendant la seconde guerre mondiale, ayant été agent du service de renseignement des SS. 

Olivier Mordrel fut l’un des co-fondateurs du premier journal « Breiz Atao » (dont Boris le Lay a repris le nom pour son blog), et co-fondateur du premier « Parti National Breton » (1931/1939), proche de l’idéologie nazie à partir de 34. https://fr.wikipedia.org/wiki/Parti_national_breton

Olivier Mordrel échappera aux condamnations en fuyant en Argentine, ou est né son fils, Tristan Mordrelle.

Celui-ci a créé en 1986 une librairie parisienne, Ogmios, qui diffuse des ouvrages antisémites et négationnistes. 

Il est aujourd’hui considéré comme l’un des principaux leveurs de fond de l’extrême-droite française. Il a participé au financement de TV-Libertés, mais également de la campagne présidentielle d’Eric Zemmour en 2022, via sa société Omni Raise, basée à Redon (aujourd’hui en redressement judiciaire).

Plus d’infos : https://fr.wikipedia.org/wiki/Tristan_Mordrelle

https://www.letelegramme.fr/dossiers/les-coulisses-du-financement-de-lextreme-droite/

Claudine DUPONT-TINGAUD

Militante identitaire historique, elle est installée à Quimper où elle fait régulièrement parler d’elle, par exemple pour avoir brandi une affiche « Merci Pétain » ou une couverture de « Valeurs actuelles » pendant les cérémonies du 11 novembre. Elle est la fille de militants de l’OAS, avec qui elle a été emprisonnée à 18 ans, devenant ainsi la plus jeune détenue de l’OAS à la prison de la Petite-Roquette.

Plusieurs personnes de sa famille étaient liées à cette « organisation de l’armée secrète », proche de l’extrême droite, pour la défense de la présence française en Algérie par tous les moyens, y compris le terrorisme à grande échelle.

Elle a soutenu la candidature d’Eric Zemmour en 2022. D’après Médiapart, c’est d’ailleurs chez elle que s’est tenue une réunion en juillet 2022, à l’initiative de Philippe Millau, afin de discuter de la candidature d’Eric Zemmour à la présidentielle et de l’organisation de ses soutiens en Bretagne.

Son fils, Grégoire Dupont-Tingaud, était « responsable du maillage territorial » de la campagne de Zemmour. C’est sous le pseudonyme « Grégoire Gambier » qu’il est le porte-parole de l’institut Iliade et collaborateur à « Polémia ». Ces 2 structures sont des sites dit de « réinformation » qui, sous couvert de défense des valeurs européennes, propagent des idées d’ultra-droite. Grégoire Dupont-Tingaud y écrit par exemple des articles sur « l’épopée militante d’Ordre Nouveau » (Ordre Nouveau étant le mouvement néo-fasciste des années 70 à l’origine de la création du Front National de Jean-Marie Le Pen).

https://www.mediapart.fr/journal/france/301021/en-coulisses-les-ex-lieutenants-de-bruno-megret-s-activent-pour-la-campagne-zemmour

Gilles PENNELLE

Conseiller régional de Bretagne pour le Rassemblement national, Gille Pennelle est désormais Directeur Général du parti fin 2022. Plus spécifiquement connu dans la région pour ses vidéos virulentes de dénonciation de l’immigration, ou il multiplie les erreurs, démontrant sa méconnaissance du sujet et sa vision purement idéologique.

Il est très actif sur les réseaux sociaux, où il prône la liberté d’expression, mais toute personne qui le confronte à ses erreurs est automatiquement censuré. Ses nouvelles fonctions nationales et ses ambitions européennes le rendent un peu moins actif dans notre région.

LES ORGANISATIONS

ADSAV

Adsav est un parti nationaliste et indépendantiste breton, fondé en 2000 par Patrick Montauzier, ancien militant du « Front de libération de la Bretagne », elle-même considérée comme une organisation terroriste. Il a été condamné à 15 ans de réclusion criminelle pour sa responsabilité dans l’attentat du château de Versailles en 1978.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Padrig_Montauzier

Patrick Montauzier est encore aujourd’hui le directeur de publication de la revue « War Raok ».

Boris Le Lay, Philippe Millau, Yann Vallerie, ont été des militants du parti ADSAV.

Le site du parti, blog.adsav.org, n’est plus actif aujourd’hui, mais il continuait de diffuser des articles jusqu’en mai 2019. Il s’est principalement illustré lors de manifestations ayant pour but de s’opposer à l’immigration, qui la plupart du temps dégénèrent en violences.

Novembre 2015, manifestation anti-immigration à Pontivy :

Violences en marge de la manifestation d’ADSAV.

Entre 150 et 200 militants d’Adsav sèment la terreur dans le centre-ville.

Janvier 2016 – Quimper

Quimper : des violences après la manifestation d’ADSAV

Violences extrémistes au Pointin Still, il témoigne.

Novembre 2016, manifestation à Arzon

Le 14 novembre 2016, une manifestation est organisée à Arzon, suite à l’agression d’une personne âgée par un mineur isolé étranger.

La manifestation dégénère, les gendarmes sont obligés de protéger le centre d’accueil.

La manifestation est filmée et retranscrite en direct sur le site Breizh-info, mais supprimée quelques jours plus tard, celle-ci montrant clairement des manifestants qui agressent et insultent les forces de l’ordre.

Suite à cette manifestation, 4 personnes sont jugées pour avoir frappé un employé municipal et être entré par la force dans le centre d’accueil. L’un des 4 prévenus, âgé de 19 ans, se suicidera avant la comparution.

Adsav serait sans activité depuis 2016, d’après le dernier président en date, Ronan Le Gall.

Fin 2016, pourtant, ce dernier participe à une manifestation à Arzon, et est même condamné par la justice qui le soupçonne d’avoir organisé le rassemblement en question. Il a ensuite été condamné pour non dépôt de comptes de son parti, et c’est à cette occasion qu’il affirme que l’association n’est plus en activité, aucun bureau n‘ayant d’après lui été élu à partir de 2016.

Plus d’infos : https://fr.wikipedia.org/wiki/Adsav

ALLIANCE SOUVERAINISTE BRETONNE

Cette organisation récente ne se présente pas comme un « parti », mais un « mouvement souverainiste de droite ». D’après Erwan Chartier (aujourd’hui la cible de menaces pour avoir diffusé dans le journal « Le Poher » des articles sur le projet d’accueil des exilés à Callac), cette organisation a pourtant écrit une lettre à Eric Zemmour afin de lui proposer un « ralliement » et un appel à voter pour lui : 

Il y fait allusion au possible ralliement de personnalités bretonnes comme Padrick Montauzier, et aussi d’autres « anciens responsales d’ADSAV », sans les nommer.

PARTI NATIONAL BRETON

Historiquement, le « premier » PNB a été un parti nationaliste breton qui a existé de 1931 à 1944, qui a adopté un virage vers l’idéologie nazie à partir de 1934.

Depuis fin 2021, un nouveau et informel « Parti National Breton » a vu le jour sur les réseaux sociaux, Facebook et Twitter, et sur internet.

https://www.facebook.com/Parti-National-Breton-Strollad-Broadel-Breizh-104330375616005/

Ces réseaux diffusent des actus et des podcasts, et sur le terrain s’illustrent par la diffusion de tracts : https://partinationalbreton.com/activisme/

Aucune info ne permet de savoir qui se cache officiellement derrière cette nouvelle émergence du PNB, mais il est assez probable que Boris Le Lay en soit à l’origine : il a diffusé, en juillet 2021, une vidéo intitulée « Pour un Parti National Breton », et le site du PNB faisait partie des sites identifiés pas le hacker qui a mis hors ligne ses sites début 2022.

Il rediffuse sur sa page Facebook les publications du PNB, seulement quelques minutes après leur diffusion. On peut reconnaître sa voix, grossièrement déformée, dans les podcasts du site. Il est donc probable qu’il soit l’organisateur, à distance, des actions de ce groupuscule, avec l’aide de quelques personnes en local.

La façade « régionaliste » masque grossièrement des positions extrémistes, il suffit de lire en détail leur « programme » pour découvrir et reconnaître les obsessions pathologiques de Boris Le Lay.

RASSEMBLEMENT NATIONAL

Les partis nationaux ont toujours été dans une relation ambigüe avec les partis régionaux d’extrême-droite, se voyant respectivement comme des adversaires potentiels, tout en ayant besoin ou en espérant se servir de marchepieds respectifs.

Aux élections présidentielles, en Bretagne, le Rassemblement National a toujours réalisé des scores inférieurs à la moyenne nationale, comme le montre les graphiques ci-dessous. Même s’il reste largement minoritaire, comme partout ailleurs les scores augmentent progressivement.

Aux élections législatives, les scores du RN sont aussi plus bas qu’ailleurs, la Bretagne étant la seule région, avec les Pays-de-la-Loire, à n’avoir élu aucun député de ce parti.

Il faut dire que la plupart de leurs candidats aux dernières élections législatives ont juste prêté leurs noms pour remplir les listes, n’étant parfois même pas résident de la circonscription concernée.

A noter qu’aux élections régionales, le RN a obtenu un score inattendu en 2015, mais est retombé en 2021 quasiment au même score qu’en 2004 en termes de voix.

RECONQUÊTE

La candidature d’Eric Zemmour, en 2022, a redonné un petit élan à l’extrême-droite bretonne, ses positions extrémistes étant plus en adéquation avec les mouvements bretons les plus radicaux. L’échec de Zemmour aux présidentielles et aux législatives a fait retomber l’élan, mais Reconquête tente de garder une emprise locale, principalement en menant des manifestations contre l’accueil des exilés, comme ils l’ont fait à Callac dans le Finistère, ce qui a conduit la municipalité à abandonner le projet. Lors des manifestations contre le projet étaient visibles de multiples banderoles de Reconquête, mais y participait aussi des acteurs connus de l’extrême-droite, comme Pierre Cassen (Riposte Laïque) et Christine Tasin (Résistance Républicaine). Leurs présence répétées ces derniers mois dans notre région laisse penser qu’ils pourraient s’être installés ici. D’autres personnalités de différents bords, mais toutes connues pour des positions islamophobe, voire clairement néo-nazies, étaient présentes.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *